Piégés par Commesso et Vinokourov, Robin et Durand ont
dû s'avouer vaincus à quarante kilomètres du but.
En montant dans leurs camping-cars respectifs, garés l'un en
face de l'autre après la ligne d'arrivée, Jacky Durand et
Jean-Cyril Robin se sont terrés dans un long silence lourd de sens.
Les deux hommes avaient besoin de retrouver leurs esprits après
242 kilomètres d'échappée pour rien. Jacky Durand
semblait le plus marqué, lui qui avait tenté le coup de poker
à quarante kilomètres de l'arrivée. "J'y ai cru
durant toute la journée, je n'avais pas mal aux jambes, j'étais
bien, raconta-t-il un peu plus tard. J'attendais la dernière
côte pour attaquer mais elle était plus dure que ce que j'avais
prévu. Au bout de cent mètres, je regrettais déjà.
Je me suis dit que s'ils revenaient sur moi c'en était fini."
Le contre de Salvadore Commesso suivi d'Alexandre Vinokourov allait vite
confirmer les prédictions du Mayennais. Jean-Cyril Robin et Jens
Voigt, les deux autres membres de cette longue échappée,
durent se contenter de subir sans pouvoir suivre l'Italien et le Kazakh.
"Jusque là il y avait une bonne ambiance dans l'échappée,
expliqua le leader de l'équipe Bonjour. Tout le monde roulait
sauf un, Alexandre Vinokourov, qui montrait des signes de faiblesse. Je
n'ai pas compris pourquoi Jacky a attaqué de si loin, j'ai été
surpris. Je ne pensais vraiment pas que l'échappée allait
se décomposer aussi loin de l'arrivée." Les deux Français
avaient donc raté là une belle occasion, l'une des dernières
sans doute de ce Tour de France. C'est Jacky Durand qui paraissait le plus
affecté par cette évidence. "Maintenant il n'y a plus
beaucoup de solutions avant Paris, analysait-il. Ca fait chier,
toute l'équipe Lotto tourne autour depuis un moment. Le destin en
a décidé autrement. Sur le papier, troisième d'une
étape, c'est une belle place mais dans une semaine tout sera oublié.
Le plus rageant c'est qu'aujourd'hui j'avais les jambes pour gagner."